On ne sait pas à quoi s'attendre, on a peur d'en attendre un peu trop et d'être déçu. Mais plus aucune question lorsqu'on pose les pieds à  Punta Arenas, qu'on aime souvent comparer à un roman de Dickens, en effet on se sent un peu Oliver Twist. Des maisons de toutes les couleurs, du bleu, du vert, du jaune, orange ou encore violet certains ont même osé le rose... tout cela vient égayer un temps parfois un peu maussade. Et lorsqu'à cela s'ajoute un ciel bleu azur parsemé de nuages noirs typiques de la Patagonie, le tableau est absolument parfait. De partout au Chili le soleil se couche derrière les Andes, mais pas à Punta Arenas, unique ville où le soleil va se cacher derrière la mer. Autour de la ville des kilomètres et des kilomètres de pampa. Peu de végétation parvient à affronter la rudesse du climat, El Calafate petite baie locale fait preuve de bravoure et son courage lui donne un petit quelque chose en plus, pour aromatiser une bonne bière locale, à picorer directement ou en confiture comme chez Yolanda, ma maman de Patagonie. J'avais l'air d'un petit oiseau sorti du nid chez elle ou d'une clandestine ayant mangé du pain dur pendant des jours, tant je me suis goinfrée; et comme l'accent local est quelque peu difficile à comprendre voir parfois impossible, Yolanda parlait pendant que moi je mangeais, je mangeais, je mangeais... sa délicieuse casolleta, mélange de fruits de mer et de légumes en soupe,  ça réchauffe le coeur, ça met de bonne humeur. Plus je mangeais, plus Yolanda était heureuse, "regarde, elle adore ça! " qu'elle disait à Dallas son mari. Le premier matin ou je me suis réveillée chez eux, j'ai retrouvé un peu effarée quand même, Franklin leur fils, qui dormait par terre à même le carrelage pour me laisser son lit! Si ça c'est pas de la bonté! Mais Franklin il aime le défi, passionné de photographie, il a parcouru le Torres del Paine pas moins de quinze fois, et c'est donc avec des conseils d'expert que je m'en suis allée le decouvrir à mon tour. Mais quand j'ai dû quitter la maison j'avais de la buée plein les yeux. Yolanda m'a embrassé autant de fois qu'elle m'avait servi de louches de soupe, et Dallas m'a donné deux rouleaux de PQ, 8 jours de trekking m'attendaient, j'en ai alors conclu que j'allais en chier. 
En route pour Puerto Natales, c'est bel et bien un bus qui me prendra en stop! Assise à côté du chauffeur et de son collègue, je passerai le trajet à boire du café et à chanter du France Gall avec mes deux nouvelles recrues... Tape sur des tonneaux, sur des pianos... Elle a, elle l'a... ce je n'sais quoi que les autres n'ont pas et qui nous met dans un drôle d'état... la Patagonie. 
Ici on peut trouver des flamands roses dans les lagunes, des cygnes à cou noir (peut-être que ça leur tient chaud!), des moutons qui vivent avec des gnanacos, des vaches qui cohabitent avec des pingouins et grignotent la même herbe... à rien y comprendre. Le vent souffle toujours dans le même sens, alors la nature se sculpte au travail des rafales. Les arbres penchent à l'unisson et sont tous raplapla, la lutte est difficile, ici on subi, c'est le climat qui a tous les droits. À grands coups de 120, 130, 140 kms/h, on comprend alors pourquoi il y a parfois des cordes dans les rues, pour ne pas se faire emporter dans les marées par le vent. 
Puerto Natales, on arrive d'en haut, face à nous, un petite ville de toutes les couleurs elle aussi, et au fond un estuaire entouré de monts abrupts et blanchis de neige éternelle qu'on pourrait prendre pour la renaissance de la Cordilliere des Andes. C'est Kike qui m'ouvrira sa porte, une petite auberge, chez lui, où l'on se sent chez soi, où l'on se fait des abrazos le matin au réveil, où l'on échange en partageant un bon repas pour parler trekking, voyage en sac-à-dos ou à vélo, trinquer aux rencontres, aux découvertes.